catilluscarol Agora

Mon site est sur Yahoo!

free_bouton

Villages de France... Charente... Limousin...

home

*Vieille Ville

Eglises

Remparts

Environs

Le Fer

Angoulême

french flag

Charente F-16000

us flag

Histoire

Marguerite de Valois angouleme_006

Vivre à
Angoulême

En Ville, son Passé historique...

Hotel de Ville angouleme_105k

Marguerite de Valois angouleme_007

sainte-Marthe angouleme_138

angouleme_055sw.jpg

Hotel de Ville

*Marguerite de Valois

Sainte-Marthe

rue de Turenne

Monument au Mort angouleme_150

Guez de Balzac angouleme_008

Hotel Saint-Simon angouleme_106k

rue du Soleil angouleme_025

Monument aux Morts

*Guez-de-Balzac

Hotel Saint-Simon

rue du Soleil

Theatre angouleme_118

Colonne 1816 angouleme_133

Hotel Montalembert angouleme_045

Fontaine Place du Murier angouleme_140

Theatre

Colonne 1816

Hotel Montalembert

Place du Murier

| Personnages Célèbres |
|
*Guez de Balzac | Gaudichaud | Montalembert | Resnier | M. Texier | Thevet | Marguerite de Valois |
|
Lamorlette |


Guez de Balzac
et notre Temps

Par Denise Bélanger,
|
Personnages Célèbres |*...R | .html | .pdf (78ko) |
Professeur au Lycée Marguerite de Valois,
Membre de l'Académie de d'Angoumois

A un moment ou le purisme semble totalement démodé, où la langue parlée montre le plus grand laisser-aller, où de graves incorrections se trouvent même chez ceux qui sont ou se disent cultivés, foisonnent dans les journaux et revues, enfin ou les œuvres littéraires même: romans, pièces de théâtre ou poésie emploient de plus en plus le style de la vulgarité, ne peut-il sembler totalement désuet de rappeler le souvenir d'un homme qui naquit, il y a quelques trois cents soixante-dix ans, à Angoulême: Jean-Louis Guez de Balzac? Pourquoi donc essayer de tirer de l'oubli celui - à part un buste à l'entrée du Jardin Vert, une plaque en la chapelle de l'hôpital, le nom du lycée de garçon de notre ville et, à quelques kilomètres de là, un château délabré - il semble bien qu'il soit inconnu de tous? D'ailleurs le peu qu'on en sait ne pourrait-il le faire considérer comme l'exemple d'un homme témoin d'une époque tout à fait révolue, dont la vie retirée du monde, l'idéal de sagesse, l'œuvre surtout de "restaurateur de la langue française" sont absolument aux antipodes de notre monde, de noter civilisation, de nos conceptions actuelles? Or c'est peut-être par cela même qu'il peut nous amener à de nécessaires méditations sur notre époque et sur nous-mêmes...

I

Qu'en sera-t-il des célébrités contemporaines, pouvons-nous penser en voyant l'oubli ou est tombé celui qui connu en son temps une si grande gloire? Vers lui convergeait "toute la prose de la chrétienté": productions d'écrivains en quête d'encouragements, lettres flatteuses de grands personnages; concert de louanges venues de tous les pays. Salué par Malherbe comme le Réformateur de la langue, considéré par les esprits les plus éminents du siècle; tels Chapelain, Conrart, Ménage(1) , Vaugelas(2) , Descartes(3) , comme le Prince des orateurs, Balzac suscita l'admiration unanime: la Sorbonne qualifia de "royaux" les sujets qu'il traitait, Richelieu le nomma Souverain de la République des Lettres, Ménage déclara: "Rien n'est égal à l'empressement que témoignait le public avec les lettres de M. de Balzac, lorsqu'il s'en imprimait de nouvelles". Les Messieurs de Port-Royal le prirent pour modèle de l'art d'écrire et Pellisson(4) affirmait qu'il était "non seulement le plus éloquent de son siècle, mais encore le seul éloquent".

Cette renommée si considérable en Espagne et en Allemagne, au dire de Penuanda, premier plénipotentiaire d'Espagne à Munster(5) , s'étendait à la cour de Christine de Suède, à qui furent dédiés l'Aristippe et les Poésie latines, et particulièrement en Hollande et en Italie. Balzac recevait des "lettres dorées datées de Constantinople" et pouvait écrire: "On nous estime en Grèce et en Orient, aux dernières parties de septentrion, sur le rivage de la mer Baltique". Sans doute après sa mort, considérée comme un deuil public pour les Lettres, laissa-t-il des admirateurs, tels Racan ou La Mothe Le Vayer, Boileau(6) , Bossuet(7) , Fénelon(8) , La Bruyère(9) , ont reconnu son importance. Tallement des Reaux écrit: "Il est certain que nous n'avions rien vu d'approchant en France et que tous ceux qui ont bien écrit en prose depuis et qui écrirons bien à l'avenir en notre langue lui auront de l'obligation", et Bayle l'appelle "la plus belle plume de France". Voltaire reconnaît dans le "Siècle de Louis XIV" que Balzac a su donner "du nombre et de l'harmonie à la prose". Mais, peu à peu, reprenant une critique de ce dernier philosophe, le XVIIIe et XIVe siècles considèrent souvent que, chez Balzac, la forme l'emporte sur les idées. Et, Malgré quelques articles ou quelques thèses, c'est, autour de son nom, le silence...

Notre époque, qui, parfois, se montre assez indifférente ou sévère à l'égard du passe, mais aussi, en bien des aspects, essaie de le sauvegarder, de mieux le comprendre et se livre à des travaux de réhabilitation, en viendra-t-elle à redonner à Balzac sinon une partie de la gloire qui fut la sienne, au moins la place qu'il mérite dans l'histoire, la littérature et la pensée française?

II

Méditons aussi sur la façon dont Balzac a secoué "la poussière de l'Ecole", comme il l'a dit, avant de sentir l'éveil de sa vocation d'écrivain.

L'enseignement, à notre époque encore, est-il domine par le souci des programmes, des examens, des concours ou par le désir de permettre l'épanouissement de vocations? Sans doute peut-on alléguer qu'au temps de Balzac le collège d'Angoulême dispensait un enseignement avant tout grammatical, ne possédant pas encore les classes d'humanité, de rhétorique et de philosophie, qu'il aura seulement à l'arrivée des Jésuites à Angoulême, en 1622(10) . Or, ces études, que nous appellerions de premier cycle, et que Balzac fit jusqu'à l'âge de quatorze ans, sont-elles, même de nos jours, présentées de façon la plus vivante, stimulant la curiosité, le goût, dans la joie de la découverte ou de la communion intellectuelle? Balzac a-t-il été le seul élève qui ait pu appeler Cicéron par exemple "ce tyran de notre enfance, qui nous fait haïr le latin avant de nous le faire aimer"? Bien sur, nous pouvons accuser les méthodes en cours dans les collèges, en ce début du XVIIe siècle, tel le collège de Puygareau, à Poitiers, ou le jeune Balzac fut obligé de se plier à la discipline de la rhétorique latine enseignée par les Jésuites, maintenue par des exercices de conversation, en promenade comme en récréation, et par des dissertations, développements d'idées générales, en puisant dans les dictionnaires et les recueils de citations. Puis ce furent les études de philosophie à Paris et le faible profit intellectuel que Balzac avoue en avoir tiré; il en garde une haine du pédantisme, des jongleries d'idées, des syllogismes ridicules et des discussions stériles. Toutefois, ne donnons pas une vision trop noire et seulement négative des études de Guez de Balzac. Car sa vie intellectuelle s'enrichit avec son séjour à l'Université de Leyde. Il y fut particulièrement attiré par le prestige de Baudius, d'abord titulaire de la chaire d'éloquence puis, à partir de 1609, professeur d'histoire. C'est pour lui que Balzac écrit alors son discours sur l'Etat politique des Provinces Unies, hymne à la liberté, réquisitoire contre les horreurs de l'inquisition ou tableau de la résistance à l'autorité espagnole, page éloquente, audacieuses, énergiques. Paradoxalement aussi, la Hollande révélait au jeune Guez la richesse de la langue française. Mais un autre de ses maîtres de Leyde: Heinsius, qu'il admire pour sa vaste érudition, renforça aussi son dégoût du pédantisme à tel point qu'il entreprit, en dehors des traditions et des maîtres, de "civiliser la doctrine en la dépaysant". De cette formation universitaire, c'est donc avant tout en réagissant contre elle que Guez de Balzac fera son œuvre la plus féconde.

III

Toute vie est riche d'enseignement celle de Guez de Balzac nous montre, entre autre, l'épanouissement; l'enrichissement apportés par un séjour à l'étranger et le contact avec la fréquentation mondaine.

Un an et demi à Rome lui laissera la nostalgie de l'Italie, "la plus belle partie de la terre"(11) , "la spirituelle et l'élégante Italie"(12) , "le plus raisonnable peuple du monde"(13) , ... Il lui devra le souci de la beauté, une pureté d'humanisme, le mépris du barbare autant que des affectations de style, en un mot la naissance du goût.

Mais, plus profondément, il fera de la Rome Républicaine sa seconde patrie, et "l'ermite de la Charente" dira qu'il se propose "d'autre fin que de transporter Rome au village". En sa retraite rustique, il dit "les précieuses reliques qu'Arrien nous a sauvées de la philosophie d'Epictète". Néo-stoicien, Balzac est aussi poète. Ses vers latins ont été même déclarés par l'abbé Campé, qui s'est exclusivement attaché à l'étude de l'œuvre latine de Balzac, supérieurs à sa prose française, et un autre critique déclarait que "personne n'était au-dessus de lui dans les sujets graves", en parlant de ces mêmes œuvres latines, dont Gassendi et Corneille faisaient l'éloge: "Balzacius cui nemo non gallice modo sed latine etiam seribentium elegantiae palma non facile cedat."

Ainsi l'Italie exaltait l'humanisme de Balzac, car sans doute lui fallait-il "un peu s'éloigner de la licence française" pour découvrir un idéal vers lequel tendrait ses efforts et auquel il consacrerait toute sa vie.

En effet le grand rôle de Balzac est de vouloir écrire pour "les cavaliers et les dames", pour les "honnêtes gens" dont le bon sens lui paraît fort préférable à toute doctrine des pédants. C'est au chevalier de Méré que fut tout d'abord dédié "Le Barbon", satire impitoyable du pédantisme. Car Balzac qui, principalement en 1624-1625, fréquenta les Salons, tels ceux de Catherine de Vivonne, marquise de Rambouillet et de Mme des Loges, y retrouvant Malherbe, Racan, Voiture, Godeau, Ménage..., eut le désir surtout de "civiliser la doctrine", c'est-à-dire, répondant aux aspirations de ses contemporains, de protester, au nom de la raison, contre le fatras de l'érudition inutile, d'être le vulgarisateur du génie, de rendre la science intelligible au grand public, contrairement à ces doctes, dont "le style est si embarrassant et si épineux qu'il semble qu'ils n'aient voulu enseigner que ceux qui sont doctes."(14)

Problème toujours actuel, auquel s'attaque Guez de Balzac en se proposant de remplacer l'obscurité et le pédantisme par la clarté, de rendre la vérité compréhensible pour tous, de "rechercher dans chaque matière les vérités moins vulgaires et moins exposées en vue de les rendre si familière que ceux qui ne les aperçoivent pas les puisse toucher". "Je souffre aux philosophes, dit-il, leur obscurité qui naist de celle de leur matière". Aussi trouve-t-il inexcusable, selon Casssagne, "ceux qui écrivent de morale et de politique sans se faire entendre de tout le monde, parce qu'enfin ce sont des sciences communes à tous; l'une regarde l'homme, l'autre le citoyen et chacun à intérêt d'apprendre a bien vivre et pour soy et pour sa patrie..." Il a pense aussi que si la Politique "doit être cachée dans les préceptes qu'elle inspire aux hommes d'Etat, elle ne scaurait être trop claire dans les préceptes qu'elle donne par la plume des gens de lettre." Balzac, lui-même, y insiste: "Je tache tant qu'il m'est possible de rendre tous mes secrets populaires et d'être intelligible aux femmes et aux enfants, quand même je parle des choses qui ne sont pas de leur connaissance."(15)

Venant en un temps de confusion et de désordre, Balzac a affronte ce problème et trace la voie de la clarté, de la netteté, de la pureté. Combien d'écrivains, de philosophes ou de savants, célèbres ou obscurs, auraient intérêt a méditer l'exemple que nous donne Guez de Balzac!

IV

Sans doute faudrait-il réhabiliter Balzac trop souvent accuse d'être seulement un puriste, un admirable orfèvre de la langue, ce qui déjà n'est pas un mince éloge, puisque des critiques peu enclins à l'indulgence à son égard, comme Nisard, ont reconnu l'importance de son rôle, sur ce plan: "Les services que Balzac rendit à notre langue suffiraient à le rendre célèbre. Il ne fut guère moins utile à la prose que Malherbe à la poésie". Mais cet admirable instrument est également au service d'une pensée qui n'est pas négligeable. Car celui qui commençait sa carrière littéraire par un Discours sur l'Etat Politique des Provinces Unies et qui fut très lié avec de hauts personnages de son temps, filleul et secrétaire du fameux d'Epernon, protégé de Richelieu, qui lui rendit même visite dans sa petite seigneurie de Balzac et lui offrit les charges d'historiographe du Roi et de Conseiller d'Etat, l'auteur du "Prince" et du "Socrate Chrétien", fut incontestablement un penseur. Mais il y a là une étude qui pourrait nous entraîner trop loin et que nous remettons à plus tard: et ce sera surtout la philosophie, la sagesse de Balzac, qui feront l'objet de notre dernière méditation.
Cette philosophie, cette sagesse ne sont point faites d'abstraits concepts, mais vécus au cours d'une existence riche de promesses et de gloire, de déception aussi, car après avoir hésité entre la magistrature et l'Eglise, entrevu la Cour et ses embûches, écouté les propositions attrayantes mais asservissantes de Richelieu, il se retira, ayant moins de trente ans, en son domaine de Balzac, qui sera son ermitage. Il écrit dans sa chambre, se promène "au pied de la Montagne verte, au bord de la rivière d'argent, près des bains de Diane, vis-à-vis de son miroir"
(16) . Il compose des vers latins qu'il envoie à Ménage, près de la "Déesse Charente", "Dia Carenta", en cette prairie "où, dit-il, je marche sur les tulipes et les anémones que j'ai fait mêler avec d'autres fleurs... Je descends aussi quelquefois dans cette vallée qui est la plus secrète partie de mon désert et qui, jusqu'ici, n'avait été connue de personne... Les cygnes, qui couvraient autrefois toute la rivière, ce sont retirés en ce lieu de sûreté et vivent dans un canal qui fait réver les grands parleurs aussitôt qu'ils s'en approchent... Comme c'est moi qui ai découvert cette nouvelle terre, aussi je la possède sans compagnon... Il ne se passe de jour que je ne voye lever et coucher le soleil et que, durant ce temps-là, je ne me sépare de la compagnie des hommes pour aller jouir de la pureté de sa lumière... Au reste je suis en l'abondance jusque aux yeux..."(17) . Enfin, il se retire à Angoulême, "dans une espèce de cellule joignant l'enclos des Capucins", selon le P. Simon, son confesseur, qui déclare: "Je veux dire qu'il s'est entièrement dépouillé de tout ce qu'il lui restait... particulièrement en faveur des pauvres."

Celui qui fut surnomme "l'incomparable ermite de la Charente", écrivain de grand talent, amoureux de la Nature et de la Solitude, tout en restant en contact avec les plus grands esprits d'Europe, grand bienfaiteur de sa cité, a donc su, dans l'une des époques les plus fiévreuses et les plus troublées, conquérir la paix, la sérénité et atteindre, dans l'approfondissement de sa foi, une authentique charité. N'y a-t-il pas là aussi un admirable exemple de philosophie vécue, de sagesse incarnée, digne de nos méditations?


(1) Menegiana
(2) Vaugelas: Remarques II, 275
(3 ) Descartes; Lettres (1627)
(4) Pellisson; Histoire de l'Académie
(5) cf. Tallemant: Hist.
(6) Boileau: Réflexions sur Longin, Ref. VII
(7) Bossuet: Sur le style et la lecture des écrivains et des Pères de l'Eglise pour informer un orateur (11669)
(8) Fénelon: Lettre à l'Académie
(9) La Bruyère: Caractères, Des ouvrages de l'Esprit
(10) cf. Boissonade: Histoire du Collège d'Angoulême
(11) Lettre à M. de Brye, 10 Mai 1635
(12) Lettre XV, 19
(13) Lettre XVI, 3
(14) Lettre à Richelieu, 4 août 1630
(15) Entretiens XXIV
(16) Lettre au R. P. de Marin, professeur des Jésuites, 12 mai 1639
(17) L. à M. de Boisrobert à Balzac le 12 sep. 1623

Extrait des Bulletins et Mémoires de la Société Archéologique et Historique de la Charente, Année 1968

top

Angoulême F-16000 Europe
charente@wanadoo.fr

catilluscarol